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8 - Un texte tiré du PM 180 : La vaccination est un succès complet" !
Au temps de Napoléon, en 1807, à Menton…
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LA VACCINATION EST UN SUCCÈS COMPLET !
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C’est en 1798 qu’Edward Jenner présente son mémoire sur les « Causes et effets de la vaccine et de la variole ». Et dès 1799, sa méthode d’inoculation est introduite en France sous le nom de « vaccination ».
En janvier 1800, le traité de Jenner est traduit en français et la pratique de la vaccine commence à se répandre en France sous le coup d’un grand enthousiasme. D’ailleurs ce procédé d’inoculation et de préservation de la petite vérole a conquis Napoléon qui tient Jenner en une estime toute particulière.
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Cité en exemple
Le département des Alpes-Maritimes ne reste pas en arrière dans le mouvement vaccinatoire, il est même l’un de ceux où la vaccine se propage le plus rapidement et le ministre de l’intérieur Chaptal ne manque pas de le citer en exemple. Le 15 messidor an XII, il signale au préfet Dubouchage « que les dispositions qu’il a prises lui paraissent tellement sages qu’il les proposera aux autres préfets comme un modèle à suivre ».
Pour combattre efficacement la petite vérole, il est impératif de faire connaître à la population les bienfaits de la vaccination et de faire disparaître « les préjugés ancrés dans l’esprit du peuple et démontrer d’une façon irréfutable que cette belle découverte, loin d’appeler l’infection variolique est destinée à l’éviter ». Tâche ô combien délicate que celle qui consiste à vaincre la méfiance et la résistance de la population, surtout montagnarde, pour faire pénétrer le vaccin dans les mœurs des gens du pays. Ainsi certaines personnes sont-elles persuadées que lorsque la vaccine guérit la petite vérole, elle déclenche une autre maladie encore plus meurtrière.
Plusieurs médecins entreprennent alors dans le département une véritable croisade. en faveur de la vaccine. Ils contribuent pour une grande part à la diffusion de l’inoculation variolique : « Richelmi de Menton est un des plus zélés, parmi beaucoup d’autres ».
De son côté, l’administration préfectorale œuvre également dans le but de faire connaître le vaccin anti-variolique et d’en généraliser l’emploi « dans toutes les communes du département où la petite vérole fait de nombreux ravages ».·Ainsi le préfet Dubouchage crée-t-il à Nice un Comité central de vaccine, chargé de vacciner gratuitement tous les citoyens du département. La gratuité de l’opération s’avère vite être la meilleure solution pour que la vaccination puisse se développer parmi les classes peu aisées de la population. Deux Comités d’arrondissement (à Monaco et Puget-Théniers) et dix-sept Comités de Canton sont, en outre, constitués au chef-lieu des justices de Paix. Le Comité d’arrondissement de Monaco, présidé par le sous-préfet, se compose de neuf personnalités : Laforêt, Président du tribunal de première instance, Sigaldi, maire de Monaco, Monléon, maire Menton, Albini, juge de paix de Menton, Cortès, ex-commissaire des guerres, les médecins Richelmi et Creissel de Menton et les chirurgiens Melon de Monaco et Chiais de La Turbie.
Le comité de canton a la charge de répandre la vaccine dans la campagne et de dresser un état statistique des « variolés et vaccinés ».
Au mois de novembre 1806, la petite vérole se déclare à Sospel. Elle y a été apportée par un conscrit ligurien. En peu de temps, elle se répand dans les communes voisines où elle fait des ravages considérables. « Les hommes de l’art, rapporte le préfet, se sont aussitôt empressés d’opposer aux progrès de la variole, l’invention de la vaccine. Ce préservatif, aux progrès duquel une aveugle et trompeuse sécurité s’opposait encore, a été recherché dans un très grand nombre de communes ». D’ailleurs, Fodéré, lors de son enquête dans le département au début du XIXème siècle, trouve la vaccine « universellement adoptée sue toute la côte maritime et dans plusieurs lieux de la montagne ».
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Le maire de Menton félicité !
Pour l’épidémie de 1807, on possède des informations assez précises en ce qui concerne les vaccinations pratiquées à Menton. Pour convaincre les réfractaires à la vaccination, le maire engage le curé à exhorter les paroissiens à profiter du précieux préservatif que l’administration municipale leur offre. Les résultats sont satisfaisants : en 30 jours, le médecin Richelmi et le chirurgien Creissel ont pratiqué 527 vaccinations dans la commune et plus de 120 dans les communes avoisinantes, à Gorbio, Roquebrune, Sainte-Agnès et Castellar. « C’est le septième de la population qui a été vacciné à Menton en un seul mois ». Menton compte environ 3300 habitants. « On a sauvé au moins 200 personnes à Menton, déclare le maire, et l’inoculation de la vaccine a eu un succès complet ». Devant ces résultats encourageants. Jérôme Monléon rend obligatoire la vaccination des enfants, le 14 février 1807. Le préfet s’empresse d’approuver cet arrêté et félicite le maire pour son heureuse initiative.
Dès lors, la vaccination des enfants va bon train. Elle se poursuit à un rythme soutenu. Le 1er juillet, 520 enfants de moins de huit ans sur les 791 vivant à Menton sont vaccinés. Entre le 1er juillet et le 10 septembre, il en meurt 34 : 14 parmi les vaccinés et 20 parmi les autres. La mortalité des vaccinés est de l’ordre de 1 pour 37 (26%) ; celle des non-vaccinés de 1 pour 13 (74%). Tous ne sont pas emportés par l’épidémie mais pour quelques-uns, décédés des suites de la petite vérole, on sait que leurs parents « prêchaient contre la mesure prise pour propager la vaccine ».
Malgré tout, les résultats sont satisfaisants, tellement que le ministère s’intéresse au succès obtenu par les médecins mentonnais qui ont opposé à la dernière « épidémie varioleuse le préservatif de la vaccine ». Le préfet qui réclame un rapport détaillé pour le ministre profite de l’occasion pour rendre, une nouvelle fois, hommage au maire de Menton pour le travail de ses officiers de santé. « Ce serait pour moi, écrit-il, une véritable satisfaction de trouver dans le rapport du Comité central de vaccine, qui est officiellement répandu dans tout l’Empire, une preuve de votre zèle et de vos lumières et un témoignage de l’agrément du gouvernement… ".
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D’excellents résultats !
En 1810, une nouvelle épidémie de petite vérole se déclare dans la région de Pigna. La municipalité organise alors une nouvelle campagne de vaccination. On ne doute pas du succès de l’opération. Une statistique sur « 400 enfants derniers-nés » fait état de 320 vaccinations. 130 enfants vaccinés sont nés en 1808 et 1809, 190 sont nés an 1810, les 80 restants n’ont pas pu être vaccinés pour « cause de maladie ou de saison chaude ».
Comme lors de l’épidémie de 1807, le chirurgien de l’hospice vient prêter main-forte au médecin pour vacciner la population mentonnaise. Les officiers de santé, salariés de la commune, doivent pratiquer la vaccine gratuitement. Toutefois à titre d’encouragement, le maire leur offre une gratification exceptionnelle. En 1810, celle-ci s’élève à un franc pour chaque vaccination faite par le médecin ou le chirurgien sur les habitants de Menton. Déjà en 1807, une somme de 711 Francs avait été affectée à cet objet. « Elle n’aurait pu être employée plus utilement » déclare le maire dans son compte-rendu de gestion.
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Devant les excellents résultats obtenus par le corps médical mentonnais lors des épidémies qui ont touché la commune, le maire de Menton peut s’enorgueillir des progrès réalisés dans la vaccination de la population. « Il n’y a une seconde commune dans l’Empire français qui comme Menton puisse se flatter de n’avoir qu’un trente troisième de sa population sans être vaccinée, or cette fraction disparaîtra, (le maire n’en doute pas) dans le courant de l’année qui ira commencer » déclare Jérôme Monléon le 31 décembre 1812.
Le gouvernement impérial ne reste pas insensible aux succès de la vaccine à Menton et le ministre de l’Intérieur apprécie le « zèle des personnes qui se livrent à la nouvelle inoculation ». Et pour « prouver l’importance que le gouvernement attache aux succès d’une méthode dont il encourage, et honore les propagateurs » il décerne la médaille d’argent au médecin Richelmi de Menton pour les progrès de la vaccination qu’il a obtenu en 1808 et 1809.
Jean-Louis Caserio
Jean-Louis CASERIO
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